turned on by danger (zev)

01. il est le gosse de trop. indésiré, indésirable. le fruit d'une nuit alcoolisée, le fracas entre deux corps qui n'auraient jamais dû s'apprivoiser. elle pense pouvoir le cacher, maquiller l'adultère aux couleurs d'un amour qu'elle n'a jamais fait que mimer. mais il est trop différent zevran, il porte partout sur lui les traces d'un autre. une histoire interdite, aventure qui s'est terminée dans les larmes et dans le sang dès qu'il l'a su. c'était le seul homme qui ait jamais compté, et ce putain de gosse le lui a arraché. gamin haï, abhorré de tous les côtés. trop de cicatrices qui déglinguent son enfance, il a dans la chair leurs insultes taillées au couteau. tous ces mots qu'il lui ont craché, et qui refusent de la fermer. ça hurle dans la tête, dans le coeur qui se déchire. trop de fantômes du passé qui reviennent encore et encore le hanter. comme un carrousel qui n'en finit jamais de tourner.

02. pas assez bien zevran. pas assez docile, pas assez lisse. fais comme ton frère, zevran. c'est pas si compliqué. oh ce qu'il aimerait y arriver. laisse ta soeur tranquille, tu vas l'influencer. oh ce qu'il voudrait qu'on le laisse l'approcher, elle qui apaise un peu ses maux.
pendant des années il essaie, ne comprend pas le fossé qui le sépare du reste de sa famille. il s'explose les rêves en voulant les faire correspondre aux attentes des parents, se plie en quatre, en mille pour leur plaire ne serait-ce qu'un infime instant. frustration qui le ronge de l'intérieur, dévore le soleil qui brille si fort dans son coeur pour n'y laisser plus qu'une nuit éternelle. ça l'abîme de n'être jamais suffisant, de savoir qu'il va échouer avant même de commencer. et toujours ces regards de sa mère, ceux plein de silences et de secrets qu'elle ne lui confiera jamais. parfois il a l'impression qu'elle voudrait l'aimer, ça doit venir de lui si elle en est incapable. gosse qui fait forcément quelque chose de travers, qui n'a jamais su comment fonctionner à l'endroit.

03. il est comme une tache au beau milieu du tableau si parfait de sa famille. dans leur palais aux jolies dorures il se sent si seul, un objet oublié dans un coin poussiéreux. il aurait pu persévérer, s'épuiser l'âme jusqu'à la réduire en cendres. mais il a un incendie dans les veines zevran, une rage qui bout sous la surface. une haine qui lui détraque les os. contre eux, contre le monde entier, il ne sait pas trop. de plus en plus insolent, un diplôme difficilement obtenu après une dernière année chaotique dans ce lycée trop propret. quelques mois en fac de médecine, pour faire plaisir à maman. quelques mois seulement, avant de dérailler. d'accepter qu'il ne sera jamais le fils qu'ils voudraient qu'il soit.

04. la cassure est violente, brutale. vérités fracassantes qui se figent dans sa chair, comme des balles tirées à coup portant. du plomb dans le coeur quand il claque la porte qui se referme derrière lui, les larmes de sa soeur qui le supplie de ne pas la laisser. la seule qui ait essayé, la seule qui l'ait aimé. frère ingrat qui l'abandonne dans le royaume de papa et maman, plus personne ne sera là pour les empêcher d'en faire la petite princesse qu'ils espèrent tant.
deux trois affaires dans un sac qu'il emporte dans le noir intense de la nuit. des mois à traîner dehors, squatter les rues comme un prince déchu. quelque part il a l'impression d'avoir toujours été fait pour ça, la crasse et les réalités trop brutes, trop cruelles. obligé de voler pour survivre, enfin un truc pour lequel il se révèle doué. les doigts agiles, les scrupules au placard. ça semble si facile, de s'entendre avec ses démons.

05. il finit par se faire remarquer, et pas par les types les plus clean de la ville. une opportunité, une rencontre hasardeuse qui l'amène à eux, droit dans les filets de la bratva. petit soldat qui se laisse apprivoiser, qui trouve une famille là où il n'avait jamais pensé à la chercher. ça marche pendant un temps, il se creuse une place, une réputation parmi les autres bratoks. du carmin plein les mains et il ne tremble pas, s'en pourlécherait bien les doigts. les poings acérés, le regard carnassier. un loup affamé, du chaos plein les songes.

06. le ciel se déchire au-dessus de lui, comètes incendiaires qui foncent droit sur sa ville. en pleine mission pour la mafia rouge, quand soudain il faut courir, encore et encore, sans savoir où aller. les pas automatiques, et sans qu'il comprenne pourquoi ils le ramènent là où il ne pensait plus jamais retourner. mais il arrive trop tard, il arrive seulement pour la voir s'en aller. le petit corps de sa soeur qui gît sous les décombres de leur maison si grandiose, tas de pierres qui ont enseveli le seul être qui ait jamais compté. la seule personne qu'il était venu pour protéger. ça se fracasse à l'intérieur, ça hurle la rancoeur et l'injustice. ça le cloue sur place, incapable de bouger, de la laisser comme il l'avait laissée des années plus tôt. de l'abandonner à nouveau. le sentiment cruel d'avoir échoué, encore une fois, la fois de trop.

07. à la dérive, zev. sans plus rien pour le retenir, plus rien pour le museler. l'âme fragmentée depuis cette nuit maudite, celle qui a tout changé. le sang infecté, l'ombre qui se dégrafe de sa peau pour s'en aller exécuter ses méfaits. de nouveaux travers dans lesquels il se jette, il se prélasse. mais tout n'est pas si parfait, dans sa vie à lui rien ne l'est jamais. de longues heures passées à chercher un sommeil qui le fuit. l'ombre capricieuse qui refuse de lui accorder le moindre répit, lorsqu'elle s'estompe dans les ténèbres de la nuit. somnifères qu'il bouffe comme des bonbons, solution temporaire jusqu'à ce qu'il puisse remettre la main sur le poison de la bratva. trop d'écarts du jeune soldat, quelques grammes dérobés par-ci par-là avant de se faire dénoncer. paria qui a une dette à rembourser, alors il a fallu retourner à ses vieilles habitudes. journées passées à jongler entre l'arcade minable où il bosse parfois, et les vols, cambriolages minutieusement orchestrés. toutes ces maisons vides des beaux quartiers ; demeures de riches qu'il pille sans vergogne, leurs précieux biens arrachés, l'équilibre restauré. une justice réinventée.